Depuis l’émergence des assistants d’intelligence artificielle — comme Copilot, Gemini ou ChatGPT — une révolution silencieuse est en marche dans nos entreprises. Les TI, logiquement en première ligne, s’efforcent d’introduire ces nouveaux outils au sein des environnements numériques, souvent avec efficacité sur le plan technique. Mais, au fond, ne faisons-nous pas une erreur fondamentale ?
Et si l’intégration des assistants IA ne devait pas être seulement une affaire de techniciens, mais aussi — et peut-être surtout — un enjeu stratégique relevant des Ressources Humaines ?
Les TI : fournisseurs d’outils, mais pas d’évaluateurs d’aptitudes
Aujourd’hui, l’arrivée d’assistants IA est majoritairement gérée comme un projet technologique classique : achat, configuration, déploiement, gouvernance de la sécurité. C’est logique et nécessaire.
Pourtant, en considérant les assistants IA comme de simples outils techniques, nous ignorons leur véritable nature : ils sont des ressources collaboratives, des « quasi-collaborateurs » qui viennent épauler les humains dans leurs tâches, parfois même en proposant de nouvelles façons de travailler.
Or, qui dans l’entreprise est le mieux placé pour évaluer des ressources, mesurer des aptitudes, accompagner le développement de compétences, et aligner tout cela avec la stratégie de l’organisation ? Certainement pas les TI. Ce rôle appartient naturellement aux Ressources Humaines.
Nous devrions donc repenser le modèle :
Les TI devraient fournir les outils, mais ce sont les RH qui doivent évaluer, développer et piloter l’intégration fonctionnelle des assistants IA dans l’entreprise.
Utiliser les méthodes RH existantes pour évaluer les assistants IA
Étonnamment, les outils nécessaires pour évaluer les assistants IA existent déjà. Ce sont les mêmes que ceux utilisés pour les collaborateurs humains :
Outil / méthode RH existante | Application à l’évaluation d’un assistant IA |
---|---|
Grille d’aptitudes | Identifier les capacités natives de l’assistant : compréhension du langage, logique de raisonnement, créativité, capacité d’analyse, etc. |
Entretien d’évaluation | Simuler des scénarios d’interaction avec l’assistant pour tester ses aptitudes et son comportement dans différentes situations professionnelles. |
Tests de compétences | Créer des cas pratiques à résoudre par l’IA pour évaluer son efficacité, sa précision, sa capacité d’adaptation. |
360° feedback | Recueillir les avis des utilisateurs sur la pertinence, l’utilité, la facilité d’usage et la fiabilité de l’assistant dans le quotidien professionnel. |
Plan de développement de compétences | Identifier les domaines où l’agent IA doit être « entraîné » ou ajusté via le paramétrage, l’entraînement de modèles personnalisés ou l’affinage des prompts. |
En procédant ainsi, les RH peuvent traiter l’assistant IA comme une ressource en développement : pas parfaite, mais perfectible, avec des axes d’amélioration et des contributions stratégiques mesurables.
L’alignement stratégique : développer les compétences des humains… et des IA
Dans toute entreprise moderne, le développement des compétences est un levier critique pour soutenir la stratégie et l’innovation. Pourquoi n’en serait-il pas de même pour les IA ?
Le parallèle est évident :
- Les collaborateurs doivent faire évoluer leurs compétences pour mieux répondre aux besoins du marché et de l’organisation.
- Les assistants IA doivent eux aussi être paramétrés, entraînés et mis à jour pour mieux soutenir l’évolution des processus, des attentes et des stratégies.
Dès lors, développer les compétences d’un assistant IA (par affinement, spécialisation, ou ajout de capacités) doit devenir une mission RH aussi naturelle que celle qui concerne les collaborateurs humains.
C’est un continuum du développement des ressources humaines et artificielles au service du projet d’entreprise.
Comment les TI peuvent soutenir les RH dans cette mission ?
Plutôt que de tout gérer eux-mêmes, les TI doivent désormais devenir des partenaires stratégiques des RH. Voici quelques pistes concrètes :
- Mettre à disposition des RH des interfaces de paramétrage simplifiées pour que les équipes RH puissent entraîner, personnaliser et suivre l’évolution des assistants sans dépendre exclusivement des TI.
- Créer un catalogue d’aptitudes et de compétences IA basé sur les capacités natives et les domaines d’application possibles.
- Fournir des outils de reporting pour suivre l’usage et la performance des assistants IA de manière intelligible pour les RH.
- Former les RH aux bases du fonctionnement des IA génératives et des agents conversationnels pour renforcer leur autonomie d’évaluation.
- Mettre en place un processus d’alignement stratégique pour intégrer l’évolution des IA au plan de développement global des compétences de l’entreprise.
En somme, les TI doivent devenir des fournisseurs de moyens, tandis que les RH deviennent les gestionnaires de talents — humains et artificiels.
Conclusion : Vers une nouvelle gouvernance des ressources mixtes
L’intégration des assistants IA n’est pas simplement un sujet de déploiement technologique. C’est une mutation profonde de l’organisation du travail. Refuser de confier aux RH la responsabilité d’évaluer, de développer et de faire évoluer les assistants IA, c’est priver l’entreprise d’une vision stratégique cohérente et durable.
Et si nous faisions erreur depuis le début ?
Et si l’avenir appartenait aux organisations capables d’unir développement humain et développement artificiel dans une même dynamique de croissance ?
Il est temps de construire une nouvelle gouvernance des ressources mixtes, où compétence humaine et performance artificielle avanceront ensemble, au service de l’intelligence collective et de la réussite de l’entreprise.